Séminaire de l’équipe Fracage / 13 février 2020

04 février 2020 par D.Bechacq
Séminaire Penser les frontières et les appartenances depuis la Caraïbe et les Amériques Constantes et mutations de la communication politique Bruno Ollivier Discutante : Martine Bocquet (Sciences de l’Information et de la communication, MCF, Univ. Antilles) Jeudi 13 février 2020, 15h30/17h30 Salle 2, Faculté de droit et d’économie, Campus de Schoelcher

Résumé de l’intervention 

Dans les systèmes démocratiques, pour exercer un pouvoir, il faut obtenir les votes d’une majorité. C’est le cas de la justice rendue dans l’Athènes antique comme du conseil municipal moderne ou du CA d’une association aujourd’hui. Les moyens utilisés dans ces systèmes, afin d’emporter la conviction, relèvent de la communication politique. Cela se fait à travers des récits, ou des messages soutenus par des récits implicites, dans la mesure où, pour susciter l’adhésion, donc la croyance, il faut la présence d’un récit dans lequel chacun peut s’identifier et trouver sa place. La communication politique, ses outils d’analyse et son enseignement sont donc nés avec la démocratie. Aristote a synthétisé les connaissances de l’époque sur la communication politique et la rhétorique dans le système judiciaire (alors identiques puisque les procès se tenaient devant les assemblées de citoyens, qui jugeaient par vote). La communication politique utilise les quatre principaux moyens que connaît l’homme pour convaincre. Le premier gouverne les situations de coprésence, assemblées générales, meetings, etc. On met en jeu la parole, le corps, des rituels variés, pour emporter l’adhésion. Le second, à partir du XVIe siècle et de l’imprimerie, est l’écrit. Livre, affiche (les placards d’Amboise), pamphlet, tract etc., servent des stratégies politiques. Le troisième nécessite un émetteur et des récepteurs (s’ils sont allumés). On diffuse le même son et éventuellement la même image à tous. Enfin, depuis 1990 et surtout 2005, les réseaux informatiques renouvellent totalement les pratiques de la communication politique, même si les principes en restent les mêmes. On réfléchira sur les conséquences en communication politique de quelques transformations importantes : le format technique du message, passant désormais par un écran, sa nature et son contenu ; les conditions économiques et sociales de production du message et de sa lecture ; la remise en cause des médiations classiques (partis politiques, églises, médias, syndicats…) ; avec les réseaux sociaux, l’exploitation des données personnelles permet un ciblage automatisé de la publicité comme de fausses nouvelles envoyées quelques jours avant les votes. Des entreprises spécialisées ont joué un grand rôle dans les succès de D. Trump, la création de LREM ou le Brexit ; le rôle incontournable d’entreprises liées au commerce des données : Cambridge Analytica comme les tests de psychologie proposés sur Facebook, Nationbuilder.com qui compte parmi ses clients La République En Marche, (jusqu’en 2019) des partis, mouvements féministes ou de minorités ethniques etc.

Bruno Ollivier, Professeur émérite en Sciences de l’information et de la communication dont il a créé la filière à l’Université des Antilles, est membre du LC2S. Il travaille sur l’épistémologie des Sciences de l’information et de la communication, les phénomènes identitaires et leur lien avec le politique. Il est l’auteur notamment de Observer la communication : naissance d’une interdiscipline (2000) ; Les sciences de la communication : théories et acquis (2007) ; Identité, identification : sens, mots et techniques (2007) ; avec Yves Jeanneret, Les sciences de l’information et de la communication : savoirs et pouvoirs (2004). Il a récemment publié Ce que les politiques font avec la communication : vérité et pouvoir de Gorgias à Cambridge analytica (2018).

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